Ladyfest

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Thèse de doctorat – Université de Lorraine (2017 – )

Ces dernières années, les luttes contre le sexisme et les violences de genre dans les industries musicale et culturelle ont peu à peu gagné l’attention des médias français. Cependant, dans les scènes amateures dites « Do-It-Yourself » (DIY), les interventions féministes et queer jouissent d’une ancienneté bien plus marquée.

C’est en ce sens que j’ai souhaité mener mes recherches doctorales autour du développement du réseau de festivals d’inspiration punk-féministe, les Ladyfests, dans deux pays européens, la France et l’Allemagne. Ces travaux s’inscrivent à l’intersection d’une ethnomusicologie féministe et queer et des Cultural Studies. Grâce à l’observation ethnographique de festivals et l’analyse des médias produits par ces derniers, il s’agit de penser les pratiques et productions musicales comme des espaces où les rapports sociaux et luttes de pouvoir qui structurent les sociétés contemporaines sont tantôt affirmés, discutés, disputés, ou reconfigurés. Ainsi, les Ladyfests, dont les programmations mêlent débats, conférences théoriques, ateliers de pratiques musicales et concerts, permettent aux femmes et aux minorités de genre de développer une forme d’agentivité dans les pratiques musicales DIY – ceci non sans que certaines limites leur soient parfois opposées.

Parallèlement, en s’intéressant d’emblée aux transferts culturels, mes travaux questionnent les processus d’« américanisation » des mouvements sociaux ou culturels européens. L’arrivée des Ladyfests – un phénomène né aux États-Unis en 2000 – en Europe signe-t-elle l’américanisation de leurs scènes musicales et groupes d’action féministes ?

Pour répondre à cette question, il faut commencer par interroger les liens entretenus par Ladyfests françaises et allemandes avec les mouvements queer et féministes apparus dans les scènes punk nord-américaines depuis la fin des années 1980. Or, l’on observe ici que les festivals européens reconnaissent certes une influence américaine, sans que cela ne les empêche de faire aussi valoir des modes d’action ou des préoccupations issues de leurs environnements locaux et nationaux.

S’intéresser aux cadres politiques des Ladyfests européennes permet d’approfondir cette question et révèle d’autres transferts culturels et générationnels. Or, parmi ces circulations, certaines permettent de remonter jusqu’aux États-Unis, mais d’autres sont résolument européennes : les manifestations nocturnes de la Walpurgisnacht, qui se développent en Allemagne dans les années 1970 et se poursuivent de nos jours, dénotent quant à elles d’une reconfiguration féministe du folklore d’Europe Centrale. En outre, de ces influences multiples, émergent parfois des conflits opposant par exemple féminisme abolitionniste et féminisme queer.

Quelle que soient leurs origines, l’ensemble de ces influences politiques imprègne également la production musicale et invite à penser une écoute musicale féministe qui se construit autour de ces régimes de transmission. Dans le cadre des Ladyfest, la musique n’a pas seulement une valeur esthétique ou festive : elle souligne l’existence de lignées féministes, ou participe, aux côtés d’autres dispositifs (comme des chartes collectives d’utilisation de l’espace) à la structuration et la réglementation de l’espace social du festival.

Par ailleurs, les pratiques et œuvres musicales qui circulent dans ces festivals dépassent largement le cadre du punk : en réalité les Ladyfests européennes ont largement ouvert leurs programmations au rap ou aux musiques électroniques. L’ensemble de ces genres musicaux est alors investi aussi bien sur scène que dans des ateliers de découverte musicale proposés au public des festivals, dans la lignée des pratiques de la « community music ». Or, cette diversité musicale encourage également le développement d’hybridations stylistiques, s’opposant à une authenticité musicale perçue et critiquée comme une valeur typiquement masculine. Plus encore, ces processus d’hybridations musicales permettent également de trouver trace de migrations post-coloniales, qui contrastent avec la blanchité apparente des mouvements d’inspiration punk-féministe.

In English

PhD Thesis – Université de Lorraine (France) (2017 – …)

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